La Martinique, Kilti an nou (notre culture)

La Martinique est une île riche en culture. Nos traditions, nos coutumes font la beauté de cette région. J’ai donc envie, à travers cet article, de vous faire connaitre nos habitudes, notre héritage et notre patrimoine. Il y a, selon moi, un certain nombre de choses que vous devriez connaître si vous explorez les lieux. Je vais tenter de vous résumer tout cela.

LE CRÉOLE

Tout commence par la créolisation. Le créole, c’est quoi?

Par définition, « le créole est le mélange de culture, de personnes nées dans des colonies intertropicales ». De ces personnes, naît une langue native. Le créole est une langue pluridimensionnelle. On distingue plusieurs types de créole en fonction de la région comme le créole guadeloupéen, martiniquais, haïtien et bien d’autres encore. Toutefois, mise à part quelques patois, le langage est similaire. Le créole est en soit, le résultat d’un mixte de langages semblables. Il est ancré dans notre patrimoine culturel, car il émane de la colonisation. Nous perpétuons nos racines en articulant ce dernier.

L’apprentissage de la langue est toutefois atypique. Il est vrai que le créole est une langue parlée, mais difficilement écrite. Dorénavant, une multitude de sociétés et d’associations donne des cours pour apprendre à écrire le créole. La phonétique du créole dépend de la région et mue de génération en génération, ce qui a une forte incidence sur l’écrit. Le créole est aussi une façon vive d’exprimer son ressenti. C’est une langue vivante. Vous apprendrez sûrement quelques rouages avec les proverbes créoles. Énoncer des proverbes créoles est aussi l’une des façons d’exacerber, d’appuyer et de donner de la véracité à vos propos.

LE MADRAS

Le port d’un vêtement madras est une coutume traditionnelle sur notre île. Le madras est un tissu de fibre de bananier, de soie et de coton originaire d’Inde. Il est tissé avec des couleurs vives laissant apparaître généralement des carreaux. Son expansion dans les îles provient de la colonisation. Il était anciennement porté par toutes les femmes créoles. Des robes sont confectionnées avec une coiffe en madras, le tout, accompagné de bijoux comme les « colliers choux ». De nos jours, le costume créole est porté uniquement par des dames âgées.

La coiffe est le fameux « Maré tèt » qui a une signification bien précise que je trouve assez drôle, d’ailleurs. Certaines étaient utilisées pour les cérémonies comme « la tête calendée » communément appelée « tête chaudière », ou pour transmettre un message sur la situation amoureuse de ces dames. Selon le nombre de pointes de la coiffe, le message est différent:

  • Coiffe à une pointe : le cœur est à conquérir
  • Coiffe à deux pointes : le cœur est déjà pris, mais la chance peut encore sourire aux plus audacieux
  • Coiffe à trois pointes : le cœur est lié par un mariage
  • Coiffe à quatre pointes : le cœur est susceptible d’accueillir encore des amants
  • Coiffe matador : cette femme est entretenue avec un billet de banque
Le madras en toute sa splendeur
Les différentes coiffes (@pinterest.com)
Tenue traditionnelle (@baroudeur)
Une autre de nos belles tenues (@dodyshop)

DANSES TRADITIONNELLES

Si vous faites un tour en Martinique, vous verrez, il y a de nombreux rythmes tropicaux qui risquent de vous enchanter. Chacun d’entre eux à son histoire et son importance au sein de notre île. La danse fut antérieurement, une façon pour les esclaves, d’exprimer leurs désirs, rêves, et aussi leurs sentiments de révolte.

LA BIGUINE

La biguine prend naissance dans la commune de Saint-Pierre au Nord Caraïbe de l’île. Elle est issue de la créolisation et de la polka européenne. Il existe trois types de biguines : la biguine de salon, la biguine de rue et la biguine de bal. Le banjo, la clarinette, le violoncelle sont des instruments qui compose la biguine. Elle est habituellement, synonyme de fête et se danse en couple. Elle se mélange également avec des airs de Jazz dans les années 1950. Beaucoup de chanteurs, compositeurs, ont contribué à l’expansion de cette musique dans le monde comme Loulou Boislaville, Barel Coppet, Max Ransay, Max Télèphe et une multitude d’autres auteurs.

LE BÈLÈ

Traduit mot à mot, le « bèlè » signifie « le bel air ». C’est une danse inspirée de l’Afrique caractérisée par des chants et des réponses. Je m’explique : l’organisateur de bèlè s’adresse à ses choristes qui lui répondent tout en chantant. Bercée par le tambour, instrument dominant de cette mélodie, cette hymne rappelle principalement la vie quotidienne traditionnelle ainsi que les gestes des anciens: coupeurs de cannes à sucre, des femmes au foyer, les ouvriers travaillant le manioc, etc…

Il y a ici des coupeurs de cannes avec leurs coutelas

LA KALENDA

La Kalenda est une danse très expressive avec des chorégraphies plus charismatiques. Elle provient de l’Afrique plus précisément de la Guinée. Elle est plus audacieuse et vigoureuse que le Bèlè. Les danseurs sautent, tournoient en levant les bras, et vibrent au rythme cadencé du tambour. Elle fait penser à un flirt amoureux caractérisé par des mouvements et breaks vifs.

LA MAZURKA CRÉOLE

Celle-ci nous est donnée par la Pologne et apparaît dans les années 1920. Elle se danse généralement sur douze temps. Elle compte deux figures de style, le piqué et la nuit. Le piqué est une série de trois pas suivis d’un arrêt piqué et la nuit est un tempo plus ralenti qui ressemble à une valse langoureuse.

LE LAGHIA DE LA MORT

Elle provient de la République du Bénin. Autrefois, les esclaves ne devaient pas se battre entre eux, cela était totalement interdit. Ils ont donc inventé le Laghia afin de pouvoir affirmer, extérioriser leur ressenti. La lutte couplée d’arts martiaux est déguisée en danse. Les combats sont vivement représentés à mains nues. Elle est par conséquent, très dynamique.

LE ZOUK

Je ne suis pas sûre que vous connaissiez les différentes danses présentées précédemment, mais je pense que celle-ci n’est pas inconnue. Je suis certaine que vous avez déjà entendu un morceau de zouk. Tout le monde connaît le Kolè Séré de Jocelyne Béroad (la base) ou encore Maldón de Zouk Machine. C’est un genre musical des années 80 provenant de la Martinique et de la Guadeloupe. Il y a plusieurs variantes du zouk original :

  • Le zouk love généralement sur des chansons d’amour et sur un rythme plus doux
  • Le zouk chiré, qui lui se danse sans partenaires, car il reprend le rythme du carnaval. Un exemple, Syé Bwa de Kassav
  • Le zouk rétro, qui est du zouk ancien provenant des années 80 comme Lanmou Rèd de Battery Crémil

PLANTATIONS AGRICOLES

Vous le savez, la Martinique est connue pour ses multiples productions. De nombreuses bananeraies et de plantations de cannes à sucre qui permettent la production de sucre et de rhum. C’est l’héritage de la colonisation. De nombreuses habitations agricoles régissent l’île. Autrefois, les esclaves produisaient le « Tafia » (un alcool tiré des mélasses des cannes à sucres) avant même de commencer la production de rhum. De nos jours, la production de rhum est répandue sur toute l’île. Il existe plusieurs types de rhums: le rhum blanc, le rhum paille et le rhum vieux. La production de sucre, elle, est centralisée par l’usine du Galion de Trinité. Toutes nos productions sont exportées dans le monde entier.

Exploitation de la canne à sucre (@licenceproAbcd)
Exploitation de bananes (@syngeta)

TRADITIONS LOCALES ET FESTIVITÉS

Nous avons plusieurs fêtes traditionnelles qui s’écoulent tout au long de l’année. Il ne sera pas possible de vous énumérer la totalité d’entre elles car elles sont nombreuses. Toutefois, je vous présente ici, celles qui à mon sens, font parti de notre patrimoine.

CARNAVAL

Habituellement, courant le mois de février ou mars, plus précisément du dimanche de l’Épiphanie au Mercredi des cendres, les Antilles vibrent au rythme du Carnaval. Il s’agit d’un immense défilé communément appelé « vidé » qui se pratique dans chaque commune. Bien évidemment, le plus grand est celui de la capitale de Fort de France. Tout le monde se prête à la tradition et déboule dans les rues totalement déguisé. Masques, tenues extravagantes, groupes de danses, chars, costumes, voici les prérequis pour un carnaval réussi. La musique va bon train. Sans oublier le fameux Vaval, mannequin en paille qui caricature et tourne en dérision un événement phare ou une problématique de l’année, qui sera brûlé le Mercredi des cendres pour mettre fin au Carnaval et laissé place au Carême.

Les diables rouges (@l’histoiredesantillesetdel’afrique)
Vaval 2018 avec la problématique du TCSP (@peoplebokay)
Groupe de Danse (@franceantilles)

PÂQUES

Pâques est une fête religieuse très importante pour les Martiniquais. En effet, étant de fervents croyants, il nous semble important, une fois le Carême finalisé, de célébrer Pâques. Cela commence avec le pèlerinage du Jeudi et Vendredi Saint. Le jeune est de rigueur pendant ces deux jours mais de nos jours, nous avons plutôt droit aux célèbres accras et aux poissons frits. Après la messe du Samedi Gloria, cela se traduit, le plus souvent par le rassemblement des familles à la plage pour le Dimanche et Lundi de Pâques devant le Matoutou de Crabe, une recette si savoureuse.

COMMÉMORATION DU 8 MAI

Le 8 Mai est une date importante en Martinique. Oui, il y a la commémoration pour la Seconde Guerre Mondiale. Toutefois, pour nous, cette date a une autre connotation. Le 8 mai 1902 correspond à l’éruption de la Montagne Pelée qui a ravagé Saint-Pierre, ex-capitale de l’île. La violence a été telle que tout a été détruit, soufflé. Plus de 30000 personnes ont péris suite à l’inhalation de gaz brûlants et toxiques que provoque la nuée ardente. Nous rendons donc hommage à ces personnes disparues.

ABOLITION DE L’ESCLAVAGE

Le 22 Mai est férié chez nous car c’est le jour de l’abolition de l’esclavage qui date de 1848. Il y a donc une commémoration en l’honneur de l’abolition.

TOUR DES YOLES

C’est la première semaine d’août qu’à lieu le tour des Yoles. C’est l’un des événements sportifs le plus important de l’année. Une yole est par définition « une embarcation avec une voile qui est propulsée sur l’eau à l’aide des alizées et la force des yoleurs ». Pendant une semaine, plusieurs équipes concourent sur des étapes qui délimitent des traversées d’une commune à une autre. C’est une course où elles doivent réaliser le meilleur temps afin de remporter la compétition.

@filovent

FÊTES PATRONALES

Pendant les grandes vacances, principalement, des fêtes patronales animent beaucoup de villes martiniquaises pour célébrer les saints patrons. Ce sont des soirées de spectacles, de jeu, de danses et de concert qui ravissent les petits comme les grands.

CHANTÉ NWEL

Le « Chanté Nwel » (le Chanté Noel) est l’une des traditions que j’affectionne le plus. Auparavant, il s’agissait d’aller de maisons en maisons pour chanter des cantiques de Noël en créole (bien sûr) entre amis et famille. De nous jours, pendant tout le mois de Décembre, des chanté nwel sont organisés pour le bonheur de tous en grand comité au sein des bourgs de chaque ville. Ces chansons sont accompagnées en rythme de tambours, Ti Bwa (baguettes de bois). Bien évidemment, cela s’accompagne aussi de mets traditionnels, à savoir en majeur partie, du porc en toute sauce: en jambon épicé, roussi, en pâté, en boudin, en salaison. Tout est bon à consommer. On y retrouve aussi les fameux pois d’angoles de nos plats d’antan, le punch coco et le fameux schrub.

Les pâtés de viandes!
Confection du punch coco

Voila, cet article fut long, je reconnais! Mais en même temps, la culture martiniquaise est très dense. Je pourrais vous dire encore tellement de choses. Toutefois, c’est un bon départ afin que vous soyez aguerris de nos traditions. Maintenant, vous connaissez un large panel de nos coutumes. N’hésitez pas à me laisser des commentaires.

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